Savez-vous reconnaître un comportement de stress chez votre reptile ? De nombreuses études ont cherché à savoir si ces animaux étaient eux aussi soumis au stress, et comment cela pouvait se manifester. Il ressort que les comportements sont très variés au sein de cette classe, sont différents selon les espèces, et que certaines peuvent avoir des symptômes biologiques de stress sans que cela n’affecte leur comportement.

Nous allons donc faire un tour d’horizon des connaissances scientifiques actuelles concernant le stress des reptiles en captivité et voir quelques actions qu’il est possible de mettre en place pour le limiter.

Quel impact du stress sur les reptiles ? 

Bien qu’ils soient des animaux d’apparence placide, les reptiles sont également soumis au stress. Cela se manifeste biologiquement par une hausse du taux de glucocorticoïdes. Ce cocktail d’hormones est sécrété par l’organisme en cas de danger. Ces hormones priorisent les fonctions vitales du corps et permettent une réaction et une fuite rapides. Ainsi, elles servent entre autres d’anti-inflammatoire, d’anti-douleur et de stimulants.

Toutefois, leur rôle de “priorisation” des fonctions vitales fait qu’elles réduisent le fonctionnement du système immunitaire. En effet, celui-ci peut être accessoire en cas de danger ponctuel. Mais en cas de stress chronique, quotidien, la baisse d’activité du système immunitaire impacte alors la santé des animaux, puisque c’est lui qui protège l’organisme contre les infections et les maladies.

Une réponse au stress différente selon les espèces

L’étude d’Augustine sur des serpents du Zoo de Saint-Louis (2022) a montré une variabilité de ce taux d’hormones en fonction du stress. Pour autant, le comportement des animaux présentant un taux élevé ne semblait pas différent. Une hypothèse avancée est que les besoins en énergie étant différent chez les reptiles que chez les mammifères et les oiseaux, une réponse comportementale au stress n’est pas toujours visible. Cela peut donc impacter la capacité du propriétaire à identifier le stress chez son reptile.

De plus, l’étude de Moszuti de 2017 tentait de reproduire sur les reptiles (une tortue Chelonoidis carbonaria et un Pogona vitticeps) un test de réaction à la nouveauté, utilisé chez les oiseaux et les mammifères. Les deux reptiles ont eu des réactions bien identifiables de découverte puis d’apaisement, mais les réactions ont été différentes. Ainsi, tous les reptiles ne peuvent pas être analysés de la même manière.

Warwick, dans son article de 2013 sur le bien-être des reptiles captif à partir de données comportementales, propose d’ailleurs une liste de 31 comportements identifiés comme liés au stress, dont certains sont spécifiques à certains ordres et familles (tortues, crocodiliens, serpents venimeux…).

Quelques comportements de reptiles liés à du stress

Nous ne pouvons détailler ici les 31 comportements, nous vous invitons donc vivement à aller lire l’étude, disponible en ligne (et traduite en français ici). Pour chaque comportement, les signes et causes possibles sont détaillés.

Nous pouvons toutefois relever plusieurs comportements communs à plusieurs reptiles, car les données sont très intéressantes et potentiellement utilisables par un grand nombre de terrariophiles.

Il est notamment intéressant de constater que certains comportements inverses sont indicateurs de stress. Ainsi, l’hypothermie (un animal qui reste de manière prolongée à une température basse) et l’hyperthermie (un animal qui s’expose en permanence au point chaud) sont considérés comme des signes de stress. De même, l’hyperactivité ou au contraire l’absence d’activité sont également listées. Bien sûr, ces comportements sont à contextualiser en fonction de chaque espèce et de la période de l’année (baisse d’activité durant l’hivernation ou hausse durant la période de reproduction par exemple).

Dans le cas de comportements spécifiques à certains groupes de reptiles, citons les vocalisations effectuées par les crocodiliens, certains lézards ainsi que les tortues. D’après l’étude, ce type de son est associé au stress quand il n’est pas effectué dans un contexte de reproduction. Certaines espèces de lézards, quant à elles, sont capables de faire couler du sang par leurs yeux en cas de stress, comme Phrynosoma orbiculare par exemple.

Parmi les comportements plus communs à de nombreux reptiles, on peut citer les interactions répétées avec les vitres du terrarium (ou les parois des boîtes en plastiques), et les agressions envers un congénère (en cas de cohabitation) ou envers le propriétaire.

Ces deux derniers exemples de comportements sont intéressants à noter au regard des résultats de l’étude d’Azvedo (2021). Celle-ci avait pour but de demander à des propriétaires de reptiles s’ils pensaient répondre aux besoins vitaux de leurs animaux et de voir comment ils interprétaient certains comportements de stress. Les résultats montrent qu’un nombre assez important de répondants considèrent ces deux comportements comme normaux (1/4 pour les attaques envers l’homme et 1/3 pour les interactions avec les vitres).

Comment limiter les comportements de stress ? 

Les sources de stress peuvent être très nombreuses. Elles peuvent être liées au comportement du propriétaire, l’environnement à l’intérieur du terrarium mais aussi à l’extérieur.

Les sources de stress humaines

Les reptiles ne sont pas des animaux domestiques au même titre que les chats ou les chiens. Leur présence en captivité est bien plus récente que pour ces mammifères qui évoluent à nos côtés depuis des milliers d’années.

L’homme est donc majoritairement considéré comme un prédateur par les reptiles. Notre propre comportement envers eux peut donc être une source de stress. C’est pourquoi il est souvent dit qu’ils tolèrent la manipulation mais ne l’apprécient pas. Une habituation peut être menée de manière progressive pour que l’animal s’habitue à ces interactions quelles qu’elles soient et diminue ses réactions de stress (voir Reptilmag 94, l’article sur le nourrissage des mambas ou sa version en ligne disponible ici).

Une première action à effectuer, souvent frustrante pour les nouveaux propriétaires qui veulent rapidement interagir avec leur animal, est de bien respecter cette prise de contact progressive en proposant des manipulations courtes. Celles-ci peuvent être faites juste avant le nourrissage pour positiver l’interaction.

De même, la manipulation doit être faite en sécurisant au maximum l’animal, notamment en proposant deux points d’appui pour les serpents par exemple. Les mouvements doivent être calmes et non brusques. Lorsque l’animal ne présente plus de signes de stress (tentative de fuite, immobilisme, respiration rapide), on peut progressivement rapprocher les séances ou les faire durer plus longtemps.

Gardez toutefois en mémoire que la possession de reptiles est avant tout une passion d’observation, bien que des interactions plus poussées soient possibles avec certains groupes comme les varans.

Les sources de stress extérieures au terrarium

Même quand vous n’interagissez pas avec votre reptile et qu’il est à l’abri dans son terrarium, il peut recevoir des stimulus de stress. Les passages répétés devant le terrarium, qu’ils soient dûs à un humain ou des animaux domestiques, peuvent générer de l’inquiétude. Privilégiez d’installer vos terrariums dans une pièce dédiée ou avec peu de passage. L’installation d’un terrarium dans la pièce de vie peut se faire avec un animal que vous possédez depuis déjà plusieurs mois ou années et qui ne présente plus de signe de stress. À l’inverse, ne vous étonnez pas si le nouvel habitant installé dans le salon sort très peu de ses cachettes, sauf la nuit.

La disposition du terrarium est également assez importante à prévoir. Un terrarium posé à même le sol va recevoir toutes les vibrations des déplacements dans la pièce. Vous pouvez les réduire en installant l’habitat sur une plaque de liège ou des patins par exemple. De même, évitez de placer un terrarium à proximité immédiate d’une barre de son ou autre appareil hi-fi dont les basses risquent de perturber le reptile à chaque utilisation.

Également, les animaux de compagnie sont à garder éloignés des terrariums. Il est souvent cocasse de regarder les chats se coucher sur les couvercles des terrariums grillagés. Toutefois, les cas où ces plafonds ont malheureusement cédés ne sont pas si rares. Dans le meilleur des cas, cela permet au reptile de s’enfuir du terrarium, dans le pire, le chat profite de ce nouveau jouet et vous risquez de ne pas retrouver votre reptile vivant. Les puces éventuellement présentes sur le chat peuvent également contaminer votre reptile par leurs crottes et leur transmettre des parasites intestinaux comme les tenias ou les nématodes.

Enfin, les reptiles sont des animaux sensibles aux odeurs, en particulier les serpents. Évitez donc les odeurs fortes (cigarettes, diffuseurs d’huiles essentielles) dans la pièce qui les accueille.

Les sources de stress dans le terrarium

Différentes études ont testé l’enrichissement sur certains reptiles. Ainsi, il est prouvé que la taille du terrarium ainsi que son aménagement impactent notamment leurs déplacements (Hoehfurtner, 2021).

Les interactions répétées avec les vitres ou les bords des boîtes d’élevage peuvent être dues à des espaces trop petits ou mal aménagés. J’en ai fait l’expérience avec une ponte de serpents des blés. Un spécimen de quelques semaines gardé en Braplast 1,5 L (18 x 7 x 12 centimètres) passait de longs moments à forcer contre le couvercle et les aérations de la boîte. À long terme, ce type de comportement peut occasionner des blessures sur la gueule. Le passage dans une boîte d’élevage de 37 x 22 x 16 centimètres avec de nombreuses cachettes a stoppé ce comportement.

Après quelques semaines de vie, les boîtes d’élevage deviennent souvent trop petites pour les jeunes serpents des blés qui peuvent alors exprimer leur manque de place par des interactions répétées avec la paroi de la boîte. 

À l’inverse, un terrarium de grande taille mais vide peut générer le même type de comportement. Cachettes, branches et feuillages ne sont pas juste esthétiques pour les propriétaires, mais nécessaires pour permettre aux animaux d’exprimer leur comportement naturel, se déplacer et stimuler leur quotidien.

Enfin, de nombreux enrichissements existent et sont possibles à réaliser sur les reptiles pour briser leur routine, même dans le cadre de terrariums bien aménagés et pour des animaux qui ne présentent plus de signe extérieur de stress.

Se documenter sur le comportement de son reptile

Ainsi, connaître le comportement dit “normal” de son reptile permet d’identifier rapidement un éventuel problème et de mettre en place des actions correctives.

Pour cela, il est toujours autant nécessaire de se renseigner le plus possible en amont, par la lecture de livres ou d’études par exemple.

L’expérience, que l’on a acquis ou qui nous est donnée par d’autres terrariophiles, est également intéressante. Attention toutefois à ce que cette expérience ne vienne pas mettre de côté toute remise en question, au risque de s’enfoncer dans de fausses idées. Gardez toujours un œil critique et comparez les sources quand vous lisez des témoignages d’expériences de terrariophiles sur internet.

De même, l’anthropomorphisme (l’application à l’animal de comportements humains) est souvent appliquée aux reptiles et peut donner de fausses analyses. D’où la nécessité de croiser les avis.

Rechercher si des études scientifiques ont été effectuées sur l’espèce que l’on maintient ou souhaite maintenir est également intéressant pour se documenter. Vous pouvez ainsi étudier le contexte de la recherche, la procédure effectuée et les résultats pour augmenter vos connaissances. Pour cela, une simple recherche du nom scientifique de votre animal sur le site web Google Scholar vous donnera peut-être des documents intéressants à étudier. Ce site recense toutes les publications scientifiques disponibles en ligne.

L’anglais est la langue universelle des publications scientifiques, équipez-vous donc d’un traducteur en ligne si vous maîtrisez mal la langue de Shakespeare. La disponibilité de ce type d’outil est d’une grande aide pour l’accès à ce genre d’information en ligne, quelle qu’en soit la langue. Profitez-en !

Naviguez également sur les groupes Facebook internationaux liés à votre espèce pour voir ce qui se fait ailleurs et obtenir de nouvelles informations ou idées. Enfin, même s’ils sont plus complexes à traduire automatiquement, il est généralement intéressants de lire des ouvrages dans d’autres langues, notamment d’auteurs de référence dans l’espèce maintenue.

Bibliographie

Augustine, L.; Baskir, E.; Kozlowski, C.P.; Hammack, S.; Elden, J.; Wanner, M.D.; Franklin, A.D.; Powell, D.M. Investigating Welfare Metrics for Snakes at the Saint Louis Zoo. Animals 2022

Azevedo, A.; Guimarães, L.; Ferraz, J.; Whiting, M.; Magalhães-Sant’Ana, M. Pet Reptiles—Are We Meeting Their Needs? Animals 2021

Warwick, C., Arena, P., Lindley, S., Jessop, M. and Steedman, C. (2013), Assessing reptile welfare using behavioural criteria. In Practice, 35: 123-131.

Tatjana Hoehfurtner, Anna Wilkinson, Gokulan Nagabaskaran, Oliver H.P. Burman, Does the provision of environmental enrichment affect the behaviour and welfare of captive snakes?, 2021

Albert Martínez Silvestre, How to Assess Stress in Reptiles, Journal of Exotic Pet Medicine, Volume 23, Issue 3, 2014

Sophie A. Moszuti, Anna Wilkinson, Oliver H.P. Burman, Response to novelty as an indicator of reptile welfare, Applied Animal Behaviour Science, Volume 193, 2017, Pages 98-103.

0 réponses

Laisser un commentaire

Participez-vous à la discussion?
N'hésitez pas à contribuer!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.