La définition Wikipédia de la terrariophilie est la suivante, à défaut d’avoir une définition officielle d’un dictionnaire, qui ne semble pas encore exister à l’heure actuelle :
« La terrariophilie consiste à maintenir, voire à faire se reproduire, certaines espèces animales et/ou végétales en imitant leur biotope dans un espace appelé terrarium ou vivarium de taille adéquate en fonction de l’espèce. »
Ainsi, une tendance de plus en plus importante en terrariophilie est d’aller vers les terrariums naturels plantés, afin de tenter de reproduire au mieux l’environnement naturel de nos reptiles favoris. Dehors donc les racks, plantes en plastiques, sopalin et décorations d’aquarium synthétiques !
Ne nous voilons pas la face, en tant que débutant nous avons en grande partie commencé avec des décorations plastiques. Mais lorsque l’on veut avoir un animal pour reproduire son mode de vie, il faut à un moment revenir vers le « terrain », celui où vit l’animal dans la nature, pour le comprendre et l’adapter au vase clos du terrarium.
Les terrariums plantés font parfois peur aux débutants et même aux plus expérimentés. C’est tout un mode de maintien qui est à revoir. Les tapis chauffants et câbles chauffants ne sont pas adaptés par exemple, il faut chauffer par ampoule. Vous pensiez pouvoir vous passer d’éclairage car on vous avait dit que les Gutt n’en avaient pas besoin ? Il est indispensable en terrarium naturel. 60% est un bon taux d’hygrométrie qu’il ne faut pas dépasser ? Ne soyons pas aussi radical… L’humidité comme la température sont loin d’être stables dans la nature.
Bien sûr, je n’ai pas non plus des années d’expérience en terrarium naturel, mon plus vieux datant d’un an. Je me suis juste renseignée, j’ai des bases en botanique, et j’ai pris conseils de personnes ayant bien plus d’expérience que moi. Je vais donc transmettre ici la manière dont j’ai fait mon terrarium naturel pour Pantherophis guttatus, qui est une parmi d’autres. Le but est avant tout de transmettre ces bases aux personnes que cela intéresse, et rassurer sur le fait que monter un terrarium naturel planté n’est pas si insurmontable que cela le laisse penser lorsque l’on ne s’y connait pas encore.
Précision : ici j’explique mon expérience pour un terrarium planté. Mais il y a bien sûr d’autres méthodes. Personnellement je considère aussi comme terrarium naturel un terra non planté, mais composé uniquement d’éléments naturels, sans plastique (point de vue personnel). On peut aussi installer des plantes sans que celles-ci soient dans le substrat, mais gardées en pot dans le terrarium. Certains éléments d’installation seront donc différents.
Voici donc comment j’ai réalisé (avec de l’aide, merci les collègues) un terrarium naturel planté de 120x60x60 pour Pantherophis guttatus.
Comment s’inspirer pour son terrarium naturel ?
La base est de se renseigner sur le milieu de vie naturel du reptile. Ici, c’est un terrarium naturel pour Pantherophis guttatus. Son aire de répartition est large, une grande partie Sud-Est des Etats-Unis. Des milieux humides comme la pointe de la Floride, la Louisiane ou les Everglades, jusqu’à des milieux plus tempérés de Caroline du Nord.
On les trouve aussi bien dans des plaines que dans des forêts. N’hésitez pas à aller sur youtube chercher « wild corn snake » pour trouver des vidéos de herping. Les sites de photographie également comme Flickr peuvent montrer des spécimens sauvages et leur environnement. Un autre outil intéressant est Google Street View ! Parcourez les parcs et réserves des zones de présence de l’espèce et imprégnez-vous des plantes, de l’ambiance, du type de forêt ou de milieu. Cela vous donnera des idées ! Les Gutts étant fréquents près des habitations, certaines personnes reproduisent également avec brio des bordures de fermes, mêlant nature et présence humaine.
J’ai choisi de reproduire une forêt, pas trop typée Floride mais plutôt continentale comme chez nous, parce que les feuilles de palmier ça prend de la place 😉
Ramasser des éléments de décor
Avant de mettre en place concrètement votre terrarium, il vous fait déjà rassembler les éléments du décor, penser son organisation. L’idéal est d’avoir des souches ou bouts de bois assez gros, ils donnent du volume, fournissent des éléments de grimpette et masquent bien les parois ou les coins.
Branches, souches, écorces, plantes, prenez le temps de tout récupérer, et n’hésitez pas à faire du stock en plus pour vous permettre plus de liberté lors de la mise en place (ça servira toujours ailleurs). Vous pouvez récupérer ces branches dans votre jardin, en forêt, ou le tas de bois de chauffage est également un bon lieu pour trouver des souches de bonne taille.
Regardez sur les bourses également, les écorces de liège sont courantes et pas trop chères (Naturkork, mon fournisseur officiel à Arras 😉 ), et donnent vite du volume tout en fournissant des cachettes, ainsi que des supports pour les plantes. Regardez aussi sur leboncoin. Entre les personnes qui se séparent de leur matériel terrariophile ou les gens qui tout simplement ont des souches qui encombrent leur jardin, on trouve parfois des formes de bois intéressantes et à pas cher.
Dans ce terrarium, le liège et la plaque de fond viennent du stand de NaturKork à Arras, les plaques de liège expansé sur les côtés d’un vendeur d’Arras (que je n’ai pas noté, c’est un produit relativement commun en terrario), et la souche et la branche viennent du tas de bois des grands-parents 😉
Désinfecter or not désinfecter ?
Sujet souvent soumis à débat ! Dans un terrarium naturel planté, la microfaune a un avantage conséquent puisqu’elle entretient le substrat et s’occupe du « nettoyage ». Il est d’ailleurs conseillé d’en introduire. Du coup, faut-il vraiment tuer les petites bêtes arrivées du dehors, souvent bien inoffensives pour nos reptiles (hormis d’éventuelles tiques), pour en rajouter des « validées » par nous ?
L’idéal est d’enlever le maximum d’insectes que vous pourriez voir sur les éléments ramassés dehors au moment où vous les prélevez. Ils y ont un travail à mener et ne survivront pas forcément tous au terrarium, autant en « préserver » un maximum. Les cloportes sont intéressants à garder puisqu’ils font partie de la microfaune à réintégrer. Après vous pourrez avoir des araignées diverses, fourmis, pince-oreille et autres petits insectes bien cachés dans les interstices du bois malgré votre vigilance. Si vous décidez de désinfecter au vinaigre blanc, vous les verrez détaler à toute vitesse. Sinon vous les croiserez peut-être dans votre terrarium !

Cloporte autochtone en vadrouille dans le terrarium
Les acariens des reptiles exotiques ne vivent pas sous nos latitudes, si par hasard vous en avez dans votre terrarium naturel, peut-être sont-ils arrivés par des décors achetés en bourse ou en animalerie, entreposés près d’animaux prélevés.
Les bêtes de chez nous ne sont pas dangereuses pour nos reptiles exotiques. Par contre on m’a rapporté que certaines petites bêtes blanches s’étaient un peu trop plu dans un terrarium naturel, et que leur population intensive, sans blesser l’animal, l’avait fortement stressé, ce qui l’avait impacté de manière indirecte.
Bref désinfectez si vous le souhaitez, mais évitez la javel dans un terrarium naturel… La vie risquerait d’avoir du mal à se réimplanter sur votre décor. Utilisez donc plutôt le vinaigre blanc ou le four.
Dans le cas de ce terrarium, rien n’a été désinfecté.
Le traitement des parois du terrarium
Si vous souhaitez installer des plantes dans le terrarium, celles-ci auront besoin d’être arrosées. Dans le cas d’un terrarium en verre, cela ne posera aucun problème. Mais si vous utilisez un terrarium en OSB (comme c’est le cas ici), les parois nécessitent un traitement pour résister à l’humidité.
Ici, j’ai passé 2 couches de vernis pour cuisine avec un COV minimal. Puis une fois monté, tous les coins et rainures sont scellés avec du silicone pour aquarium.
Pour assurer une imperméabilité à toute épreuve, j’ai recouvert les parois de bâche pour bassin de 2mm. La bâche est appliquée en plusieurs morceaux. Un morceau recouvre le bas du terrarium, là où sera présent le substrat, et remonte de 10cm au moins sur les parois latérales. Ensuite, chaque paroi est recouverte de son propre morceau de bâche. Comme chaque morceau passe par-dessus le rebord de 10cm de la bâche de fond, cela évite que de l’eau puisse passer derrière la bâche.
La bâche est maintenue avec du silicone pour aquarium.
Sur ces parois ont ensuite été fixées à l’aide de vis et de silicone des plaques de lièges. La plaque du fond a d’abord été coupée à la scie sauteuse.

Bâche à bassin et parois installées.
Des aérations ont été ajoutées car celles de base ne semblaient pas suffisantes. En effet un terrarium naturel, via l’arrosage, va avoir une hygrométrie plus importante, qu’il faut pouvoir évacuer via de bonnes aérations. Placez les aérations hautes toujours du côté du point chaud.
Le substrat du terrarium planté
Prévoyez un minimum de 10 centimètres de hauteur pour le substrat. Une partie sera occupée par des billes d’argiles, qui ne servent pas à « nourrir » les plantes mais à assurer un drainage et éviter un surplus d’humidité dans les racines.
Ici j’ai placé 18 litres de billes d’argiles, puis une membrane de géotextile. Celle-ci permet à l’eau d’aller dans les billes tout en bloquant l’animal si celui-ci décidait de s’enfouir.
Le substrat en lui-même dépend ensuite du type de biotope recréé. Cela peut-être un assemblage de plusieurs terreaux que vous réalisez vous-même. Surtout, assurez-vous que le terreau employé soit sans engrais chimique ajouté.
Ici j’ai utilisé de la « Terre végétale » de marque Or Brun qui est un mélange argileux et terreux sans engrais (le sac quasi entier de 25kg y est passé), additionnée de véritable terre de bruyère bio (20L), et d’un peu d’humus de coco qu’il me restait.
Quelles plantes choisir pour Pantherophis guttatus ?
Sans être des Boas, les Gutts sont quand même peu précautionneux. Ils sont peu fouisseurs, ils n’auront donc pas tendance à déterrer vos plantes, mais un passage répété sur celles-ci risque de les abîmer. Choisissez donc de préférence des plantes assez costaudes.
Pour être le plus réaliste possible, vous pouvez utiliser des plantes que l’on trouve dans l’habitat d’origine des Pantherophis guttatus, Tillandsia usnoeides étant le plus connu, mais vous pouvez être vite limité. Vous pouvez donc ouvrir un peu à des plantes de toutes l’Amérique du nord voire inclure l’Amérique du sud. J’en ai fait une liste (non exhaustive) dans cet article.
Et si vous n’avez pas envie de vous embêter avec ça, choisissez juste des plantes assez résistantes et adaptées au biotope que vous souhaitez (plutôt sec ou humide par exemple).
Après tout, seuls les botanistes avertis risqueront de voir que les plantes ne sont pas exactement de la bonne aire géographique. De plus, quand on cherche en détail, certaines plantes qui seraient d’une taille adaptée en terrarium sont très difficiles à trouver en jardinerie. Vous pouvez alors vous rabattre sur des plantes qui y ressemblent (parmi les fougères notamment certaines se ressemblent beaucoup).
Dans ce terrarium, j’ai essayé de respecter l’origine Nord-Amérique. Il y a donc : fougère de Boston (Nephrolepis exaltata, un cultivar non identifié), Polypodium vulgare (je visais une autre variété de polypodium très commune en Floride mais introuvable en vente sur le web… C’est une fougère à tendance épiphyte), Lierre commun, et des variétés de Tillandsias non identifiées que l’on m’a offert.
Attention ! Concernant le lierre, sa sève est toxique. Il est donc déconseillé d’en mettre dans les terrariums pour lézards. Pour les serpents cela pose peu de problèmes, à condition que vous évitiez au maximum de tailler le lierre une fois en terrarium. En effet, la plante perd alors de la sève que l’animal peut « lécher », encore plus si jamais vous vaporisez puisque les serpents aiment boire l’eau sur les feuilles. Il existe en jardinerie des mastics cicatrisants pour plantes, cela peut être une solution pour couvrir la plaie et éviter ces pertes de sèves.
Pour ajouter encore un peu de nature, de la mousse sèche achetée dans un magasin Action a été ajoutée à différents endroits du décor. Elle permet également de garder de l’humidité au pied de la fougère.
Le montage du terrarium planté
On a les éléments du décor, les plantes, le terrarium est monté et imperméabilisé, le substrat installé, il ne reste « plus » qu’à tout placer !
Le décor
Prenez le temps d’essayer différents agencements. Faites des photos, laissez poser votre réflexion, changez les choses de place, demandez l’avis d’autres personnes 😉
La nature n’est pas plate. Un bon conseil qui m’a été donné est d’utiliser des pierres et autres gros éléments pour donner du volume au sol. Une pierre et une souche de liège ont été enfouies pour donner de la hauteur à droite, tandis que le « terrier » au centre est une simple écorce recouverte de terre.

Mise en place du décor avec le substrat, sous la lumière ça rend déjà bien !
Il est également souvent conseillé de cacher au maximum les coins, qui sont des zones anguleuses peu naturelles. Ce sont donc les endroits idéaux pour placer feuillages et grosses pièces de décor.
Les plantes
Ne placez pas les plantes telles quel en terrarium. En jardinerie, elles sont souvent « forcées » avec de hautes doses d’engrais, et le terreau est loin d’être bio. Retirez donc au maximum le substrat et rincez le feuillage.
Laissez le terrarium tourner quelques semaines avant d’y intégrer votre serpent, afin de laisser le temps aux plantes de s’installer sans être bousculées.

Résultat avec les plantes et quelques feuilles.
La microfaune du terrarium
Dans ce terrarium ont été ajoutés plusieurs insectes : vers de terre, collemboles et cloportes. Les vers de terre permettent de garder le substrat aéré, tandis que les collemboles et cloportes dégradent les feuilles mortes et autres déchets organiques. Cela n’empêche pas de retirer les excréments du serpent lorsqu’on les voit, mais au moins ceux qui seraient dans des endroits moins accessibles seront dégradés par ces petites bêtes. J’ai commandé les miens sur le site Exoforest, qui propose également des plantes pour terrariums tropicaux humides. Malheureusement Exoforest a arrêté son activité, je recommande à présent Terrapodia. Il m’a été conseillé « d’enrichir » la terre avec des feuilles mortes afin de nourrir les insectes en attendant que les autres plantes produisent naturellement des feuilles mortes à dégrader.

Collembolles exotiques
Et voici le résultat ! Ce n’est peut-être pas le plus magnifique terrarium naturel qui existe, je le trouve encore vide par rapport à d’autres, mais cela progressera au fur et à mesure selon les occasions de ramassage de branches par exemple, et des plantes pousseront peut-être spontanément. Plusieurs semis naturels ont d’ailleurs déjà percé après quelques semaines, il n’y a plus qu’à voir s’ils tiendront et quelle plante cela donnera 😉
Combien ça coûte un terrarium naturel ?
Il faudrait comparer avec le coût d’un terrarium « synthétique » tout plastique, à première vue je ne saurai dire si cela se vaut ou si c’est plus ou moins cher. D’autant plus qu’il y a toujours des méthodes pour augmenter ou diminuer les coûts.
Voici le budget pour ce terrarium :
- Terrarium OSB 120x60x60 : 80€
- Substrat : terre de bruyère 8.95€ + billes d’argile 18.50€ + terre végétale 8.90€ = 36.35€ de substrat (ça change de la coco à 0.75€ ^^)
- Bâche : il m’en restait assez d’un autre terrarium… Environ 8€ de mémoire
- Silicone pour aquarium : 16€
- Vernis : 20€
- Cage de protection d’ampoule : 13.99€
- Poignées pour les vitres : 6.50€
- Liège : 30€ plaque de fond + 10€ les deux sur le côté
- Cachettes en liège : environ 8€ de mémoire
- Plantes : Polypodium 10€, Nephrolepsis 10€ environ
- Éclairage : Barre led environ 6€ x 3 = 18€, ampoule chauffante 2.07€, douille 3€, câble + raccord environ 8€.
Total approximatif et arrondi : 281€, dont 200€ de « remplissage ».
Cet article sera sans doute actualisé en fonction de l’évolution du terrarium 🙂
Mise à jour Août 2019
Plusieurs commentaires m’ont demandé des nouvelles, et je n’avais pas pris le temps d’actualiser l’article 😀 Voici une photo du terrarium en ce 25 août 2019, soit un peu plus d’un an après la publication de l’article.
Par rapport au lancement, j’ai perdu le Polypodium sur la souche à cause d’un manque de rigueur de pulvérisation. Le lierre qui devait coloniser le fond a également vite séché malgré un arrosage suivi. Ces pertes sont survenues avant la fin d’année 2018. J’ai remis un lierre qui lui se plaît bien et part à l’assaut de la souche (voire du plafond si je surveille pas). En début d’année 2019 j’ai aussi ajouté deux variétés de Tradescantia (misère) que l’on m’avait donné. Elles se sont bien plu et avaient bien colonisé. Mais la grossesse d’Opale les a fortement mises à mal, puisque j’ai cessé l’arrosage totalement durant quelques semaines pour être sûre qu’elle ne ponde pas ailleurs que dans sa boîte de ponte.
En effet, dans ce genre de terrarium le risque est plus élevé qu’ils pondent dans un coin bien inaccessible. Et comme c’était ma première reproduction, d’où découle la suite de mes projets et ceux de plusieurs copains, je ne pouvais pas me permettre de perdre la ponte ou tester une incubation naturelle ^^’ Du coup il ne reste que la Tradescantia verte. J’en ajouterai peut-être au fur et à mesure de nouveaux échanges de plantes. J’ai aussi ajouté pas mal de mousse sèche dans la zone chaude, car Opale a beaucoup apprécié se cacher dessous, à l’abri mais au chaud sous l’ampoule, durant sa gestation.
Concernant la micro-faune, je croise encore de temps en temps des cloportes, mais beaucoup moins qu’au début. De même, les grillons ont disparus au bout de quelques mois, les conditions ne devaient pas leur convenir (ils étaient arrivés via les feuilles récupérées en extérieur).
Sur la photo la lampe chauffante est éteinte car il fait assez chaud en ce moment 😉